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Mattéo, c’est la destinée singulière d’un homme, entraîné malgré lui et son pacifisme militant, dans toutes les guerres de la première moitié du XXè siècle. Avec une maîtrise totale du verbe et de l’image, Gibrat est au meilleur de son talent.En 1918, à son retour de Russie, sous le coup d’un mandat d’arrêt pour désertion, Mattéo s’était livré aux gendarmes, espérant « juste le bénéfice d’un peloton d’exécution, pour solder sa petite existence. » Il écopait de 20 ans de travaux forcés. Il en fit moins de la moitié car les derniers condamnés de la Grande Guerre furent amnistiés en 29. Il s’installait alors en région parisienne, et après avoir cassé du caillou à Cayenne, devenait tailleur de pierres ! Il retrouvait Paulin, son ami devenu aveugle pendant la guerre de 14, resté un communiste pur et dur, et toujours aussi susceptible, ainsi qu’Amélie, l’infirmière, en couple avec Augustin, un intello socialiste, très chic. Août 36. C’est le temps du Front populaire. C’est le bonheur des premiers congés payés. 15 jours à ne rien foutre, comme maugréaient les patrons ! En tout cas, 15 jours de loisirs. Et Mattéo, Paulin, Amélie embarquent dans l’auto d’Augustin, en route pour leurs premières vacances officielles, direction la mer, le Sud. Collioure, Mattéo n’y a pas mis les pieds depuis très longtemps au grand dam bougon de sa mère. Il ne sait même pas ce que sont devenus Juliette et son fils Louis… Août 1936. C’est la liesse des bains de mer, des pique-niques, des cartes postales, des bals populaires… Tout semble possible, même le meilleur ! Pourtant, de l’autre côté des Pyrénées, dans l’Espagne toute proche, le bruit et la fureur de la guerre civile se font de plus en plus entendre. Depuis le 17 juillet, les légalistes font face à l’insurrection menée par le général Franco. Si Paulin, à qui Mattéo fait la lecture de l’Huma tous les jours, est en rage lorsque le cabinet de Léon Blum décrète l’embargo sur les armes à destinations des Républicains, c’est un pacte de non–intervention qui est signé par les grandes puissances européennes, en revanche Mattéo y semble totalement indifférent. Il préfère lire les pages « Sports », et en particulier celles consacrées au Tour de France qui se termine. Ses années en Russie et au bagne ont détruit sa fibre militante et engagée, il ne croit plus à l’action, à l’investissement collectif. Mais ce fils d’anarchiste espagnol restera-il insensible aux cris de la patrie de son père…