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Sacro Monte, pour un lecteur distrait, est une ode au mauvais goÃÂût. C'est Stendhal en Italie, saisi de vertiges et d'hallucinations par l'excÃÂès des visions fantasmagoriques de dÃÂécors de fÃÂêtes foraines et de processions chamarrÃÂées. Le Sacro Monte de Varallo, dans le PiÃÂémont, devait plonger le bon chrÃÂétien dans les extases du pÃÂèlerin au Golgotha, voyage en Orient rendu trop pÃÂérilleux par l'Empire Ottoman qui rÃÂégnait alors en terre sainte : on reconstitua le mont en des lieux moins hostiles, comme on bÃÂâtit encore partout des grottes de Lourdes, pour les jambes fatiguÃÂées des fidÃÂèles trop ÃÂâgÃÂés. Les 800 statues de bois et terre cuite polychromes, grandeur nature, retracent le drame de la vie, la passion, la mort et la rÃÂésurrection du Christ, dans un milieu recouvert de fresques et envahi de rondes-bosses. Le choc esthÃÂétique n'est pas toujours un coup de foudre. C'est un ÃÂévÃÂénement qui peut surgir sans fracas, d'un dÃÂétail qu'on n'avait jamais vu, qu'on n'aurait mÃÂême jamais songÃÂé ÃÂàregarder. Les cloisons du bon goÃÂût nous en dÃÂétournent. On sait d'avance ce qui est beau, qu'on oppose au vulgaire. Un goÃÂût bien formÃÂé se mÃÂéfie des ÃÂéclats, du brillant, des dorures, des puÃÂérilitÃÂés de l'imitation, de tout ce fatras diaprÃÂé qui plaÃÂît ÃÂàla canaille. Heureusement, celui qu'un dÃÂétail saisit, d'une faÃÂïence ou d'une volute, est pris dans une errance esthÃÂétique qui n'a plus de limite, il voit ÃÂànouveau tout ce que soustrayait le bon goÃÂût, et le vertige est partout.